Page:William Morris - Nouvelles de Nulle Part.djvu/148

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dois vous dire qu’en fait il est très rare que la minorité fasse prévaloir cette règle ; en général, elle cède amicalement.

— Mais savez-vous qu’il y a dans tout cela quelque chose qui ressemble beaucoup à la démocratie ; et je croyais que la démocratie était considérée comme mortellement atteinte depuis déjà bien des années.

Le vieillard cligna des yeux.

— Je reconnais que nos méthodes ont ce défaut. Mais que faire ? Personne d’entre nous ne peut se plaindre de ne pas toujours agir à sa guise à la barbe de la communauté, car il est évident que tous ne peuvent pas avoir cette satisfaction. Que faire ?

— Mais, je ne sais pas.

— Outre notre méthode, les seules solutions que je puisse concevoir sont celles-ci. D’abord choisir ou élever une classe de personnes supérieures capables de juger toutes les questions, sans consulter les voisins ; nous aurions alors ce qu’on a appelé une aristocratie d’intelligence ; ou bien, deuxième solution, afin de sauvegarder la liberté des volontés individuelles, nous reviendrions à un système de propriété privée, et nous aurions de nouveau des esclaves, et des maîtres d’esclaves. Que pensez-vous de ces deux moyens ?

— Mais, dis-je, il y a une troisième ressource, savoir : que chacun soit absolument indépendant de tous, et qu’ainsi la tyrannie sociale soit abolie.

Il me fixa pendant une seconde ou deux, puis