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Page:William Morris - Nouvelles de Nulle Part.djvu/75

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Je dis :

— Mais n’avez-vous pas de prisons du tout, maintenant ?

Aussitôt que ces mots furent sortis de ma bouche, je sentis que j’avais fait une faute, car Dick rougit soudain et fronça les sourcils, et le vieillard parut surpris et affligé ; et aussitôt Dick me répondit avec colère, et pourtant comme s’il se retenait un peu :

— Jour de ma vie ! comment pouvez-vous poser pareille question ? Ne vous ai-je pas dit que nous savons ce que signifie une prison, par le témoignage certain de livres vraiment dignes de foi, appuyé de notre imagination ? Et ne m’avez-vous pas interpellé tout spécialement pour remarquer que les gens sur les routes et dans les rues ont l’air heureux ? Et comment pourraient-ils avoir l’air heureux, s’ils savaient que leurs voisins sont enfermés en prison, et supporter tranquillement de pareilles choses ? Et s’il y avait des gens en prison, on ne pourrait pas le cacher, comme on peut cacher un meurtre, qui n’est pas commis de propos délibéré, avec un tas de gens à regarder de sang-froid le meurtrier, comme dans cette histoire de prison. Des prisons, vraiment ! Oh, non, non, non !

Il s’arrêta ; il commençait à se calmer et reprit d’une voix aimable :

— Mais, pardonnez-moi ! Je ne devrais pas n’échauffer tellement à ce sujet, puisqu’il n’y a pas de prisons : je crains que vous ne pensiez beaucoup de mal de moi, parce que je m’emporte. Bien entendu, vous qui venez d’autres