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Page:Wyzewa - Nos maîtres, 1895.djvu/207

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RENAN ET TAINE

poléon a été, sur ie trùne de France, au commencement de notre siècle, un condottiere italien de la Renaissance. M. Taine, disciple de Stuart Mill et confident de Thomas Graindorge, m’est toujours apparu comme un de ces bénédictins du moyen âge qui, sans autre goût naturel que celui du travail, étrangers aux agitations passagères du monde, armés en outre de toutes les armes de la scolastique, s’ingéniaient à bâtir du fond de leurs cellules quelque vain et prodigieux édifice, des sommes où toute la philosophie divine et humaine se déduisait d’un unique principe, des canons fondés sur deux ou trois lettres secrètes, ou bien encore de ces initiales de missels qui, à elles seules, sont comme des cathédrales gothiques, avec l’infinie complication de leurs lignes et de leurs figures. De même que M. Zola, son parent bien plus que son élève, M. Taine a été un constructeur. Ses œuvres les plus longues sont aussi les plus belles : par le développement magnifique de leur ordonnance, et cette solidité des assises et cette élégance des ornements qui les égale aux plus parfaits chefs-d’œuvre de l’architecture d’autrefois.

Voyez, à ce point de vue, ses deux derniers volumes : c’est le triomphe de la construction littéraire. Tout repose sur une définition du caractère de Napoléon. Admettez seulement que Napoléon ait été un condottiere italien, vous verrez aussitôt se dresser en pleine lumière devant vous toute l’histoire du xixe siècle, vous comprendrez pourquoi la France possède tant de préfets et de sous-