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Page:Wyzewa - Nos maîtres, 1895.djvu/214

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III
LA RESURRECTION DE M. TAINE[1]
(Revue bleue, 31 mars 1894)

Je crois bien me rappeler encore que M. Renan était l’aîné de M. Taine, qu’il l’avait précédé dans la vie, dans la gloire, et qu’il l’a précédé aussi, de quelques mois, dans la mort. Mais déjà il me faut un effort pour me retrouver dans ces dates ; et de jour en jour s’efface davantage en moi, comme sans doute en chacun de nous, le souvenir de tout ce qui pourrait distinguer, séparer les noms de ces deux grands hommes. Bientôt M. Taine et M. Renan ne nous apparaîtront plus qu’en commun, dominant de leurs hautes figures le mouvement intellectuel de la seconde moitié de notre siècle : de même qu’au-dessus de toute la littérature du siècle passé nous apercevons unies, et désormais inséparables en dépit de l’histoire et de la critique, les deux figures de Voltaire et de Jean-Jacques Rousseau. Pour nous tous qui sommes nés après 1850, M. Renan et M. Taine ont été les deux maîtres : ce sont leurs deux voix qui ont le plus profondément résonné en nous. D’autres nous ont parlé plus haut, ou avec

  1. À propos d’un ouvrage de M. A. Chevrillon, Sydney Smith et la renaissance des idées libérales en Angleterre au xixe siècle.