Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 1.djvu/140

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gira d’en venir aux mains, inviteras-tu les ennemis à venir sur le terrain sablé où vous avez coutume de manœuvrer, ou bien essayeras-tu de faire les exercices sur toutes les espèces de terrain où peuvent se rencontrer les ennemis ? — Cela vaudrait mieux. — En outre, ne mettras-tu pas tes soins à ce que le plus grand nombre possible sachent lancer leurs traits de dessus leurs chevaux ? — Cela vaut encore mieux. — Piquer le courage des cavaliers, les animer contre l’ennemi, et augmenter ainsi leur force, y as-tu songé ? — Si je n’y ai pas songé jusqu’ici, maintenant du moins j’essayerai. — Pour te faire obéir des cavaliers, as-tu quelque moyen en tête ? Car sans cela, chevaux et cavaliers, excellents et vigoureux, ne te serviraient de rien. — Tu dis vrai ; mais quel est donc, Socrate, le meilleur moyen de les plier à l’obéissance ? — Tu as remarqué, sans doute, qu’en toute occasion les hommes consentent à se soumettre à ceux qu’ils croient supérieurs : dans une maladie, celui qu’on croit le plus habile médecin, on se soumet volontiers à lui ; dans une traversée, ceux qui naviguent écoutent celui qu’ils regardent comme le marin le plus habile ; en agriculture, celui qu’on croit le plus habile agriculteur. — C’est juste. — Eh bien, de même pour la cavalerie, celui qui paraît savoir le mieux ce qu’il faut faire, les autres l’écouteront de préférence. — Si donc, Socrate, je me montre supérieur à eux, cela me suffira pour m’en faire obéir ? — Oui, pourvu que tu leur apprennes aussi que l’obéissance est pour eux le meilleur moyen de gloire et de salut. — Mais comment le leur apprendrai-je ? — Beaucoup plus facilement, par Jupiter, que s’il te fallait leur apprendre que le mal est préférable au bien et procure plus d’avantages. — Tu veux dire probablement qu’un commandant de cavalerie doit, outre les autres qualités essentielles, posséder le talent de la parole ? — Pensais-tu donc que l’on dût être un hipparque muet ? N’as-tu pas songé que toutes les choses que nous avons apprises par l’usage, choses excellentes entre toutes, puisque c’est par elles que nous savons vivre, nous les avons toutes apprises au moyen de la parole, et que toute autre belle connaissance que l’on acquiert, c’est de même à l’aide de la parole qu’on y arrive. Aussi les meilleurs maîtres sont en même temps ceux qui se servent le mieux de la parole, et ceux qui possèdent le mieux les connaissances les plus utiles sont en même temps ceux qui savent le mieux en parler. N’as-tu pas songé aussi que, quand on veut réunir dans notre ville un chœur comme celui qu’on