Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 1.djvu/39

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pair ou non, parviennent à tromper en faisant croire qu’ils ont plus, quand ils ont moins, et moins, quand ils ont plus. Comment des hommes faits, avec de la réflexion, ne pourraient-ils pas inventer semblables ruses ? Qu’on se rappelle les succès remportés à la guerre, on verra que les plus nombreux et les plus brillants sont dus à la ruse. On ne doit donc pas se mêler de commander, ou bien, indépendamment des autres dispositions, il faut demander aux dieux le savoir-faire et inventer à votre tour. »

Ces instructions données, Xénophon revient à ce qui est particulier au commandant lui-même. Il lui indique les moyens de se concilier l’affection sans compromettre son autorité, lui fait un devoir sacré du respect des dieux, de la prévoyance et de la vigilance. Et comme Athènes était alors en guerre avec Thèbes, il adresse au chef des cavaliers de sa patrie des recommandations toutes particulières, motivées par les circonstances actuelles. Après quoi, il conclut à ce que, pour porter à mille le nombre des cavaliers athéniens, on admette sur-le-champ deux cents métèques, c’est-à-dire des étrangers ayant droit de domicile, à l’exemple de Sparte, dont la cavalerie n’a commencé à se distinguer que quand elle s’est décidée à cette mesure.

Une observation remarquable, qui frappe tout d’abord et dès les premiers mots de ce traité, c’est l’ordre exprès, donné et renouvelé à plusieurs reprises par Xénophon, de ne rien entreprendre sans le conseil et l’assistance des dieux. Cette pensée religieuse et naïvement sincère répand une teinte touchante sur ce livre consacré à des prescriptions techniques et à des pratiques de métier. Elle fait songer à Froissart qui, au commencement de ses Chroniques, « requiert au Sauveur de tout le monde, qui de néant créa toutes choses, qu’il veuille créer et mettre en lui sens et entendement si vertueux que ce livre par lui commencé il le puisse continuer et persévérer, » et qui, quelques lignes plus bas, invoque le secours « de Dieu et de la benoîte vierge Marie, dont tout confort et avancement viennent. » Les dernières paroles de Xénophon expliquent, du reste, fort nettement sa pensée. « Si quelqu’un s’étonne, dit-il,