Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 1.djvu/471

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Dercyllidas vient prendre le commandement de l’armée : c’était un homme qui passait pour un fin ingénieur, et on l’avait surnommé Sisyphe. Thimbron s’en retourne donc à Sparte, où il est frappé d’exil, les alliés l’ayant accusé d’avoir permis à ses troupes de piller des amis. Lorsque Dercyllidas a pris le commandement de l’armée, voyant que Tissapherne et Pharnabaze se défiaient l’un de l’autre, il s’entend avec Tissapherne et conduit ses troupes dans le pays de Pharnabaze, préférant avoir affaire avec un seul plutôt qu’avec tous les deux. D’ailleurs, Dercyllidas était depuis longtemps l’ennemi de Pharnabaze. Harmoste à Abydos, du temps que Lysandre était navarque, les calomnies de Pharnabaze l’avaient fait condamner à se tenir debout un bouclier en main, ce qui est une punition chez les Lacédémoniens, chatouilleux sur l’honneur ; c’est, en effet, la punition des déserteurs. Ce grief le faisait marcher avec plus de plaisir encore contre Pharnabaze.

Et d’abord, il montre la grande différence qu’il y a entre son commandement et celui de Thimbron, en conduisant son armée jusqu’en Éolide, province de Pharnabaze, à travers des pays amis, sans faire aucun mal aux alliés. L’Éolide elle-même appartenait à Pharnabaze ; mais Zénis de Dardanie avait été, sa vie durant, satrape en second de cette contrée. Ce Zénis étant mort de maladie, sa femme Mania, Dardanienne elle-même, au moment où Pharnabaze se préparait à donner la satrapie à un autre, rassemble une escorte, se munit de présents pour donner à Pharnabaze, et pour se rendre favorables ses maîtresses ainsi que tous ceux qui jouissent de sa faveur, et elle se met en route.

Introduite auprès de lui : « Pharnabaze, dit-elle, mon mari était dévoué à ta personne, et il payait régulièrement ses tributs, si bien que toi-même tu l’honorais de tes louanges. Si je continue, moi, à te servir avec le même zèle, à quoi te sert de nommer un autre satrape ? Si je te déplais, tu feras toujours bien de me retirer le gouvernement et de le donner à un autre. »

Pharnabaze, après l’avoir entendue, se décide à donner la satrapie à cette femme. Une fois maîtresse du pays, celle-ci fut exacte à payer les tributs aussi régulièrement que son mari ; mais, en outre, chaque fois qu’elle rendait une visite à Pharnabaze, elle ne manquait pas de lui apporter des présents, ou bien, chaque fois que Pharnabaze descendait dans le pays, elle lui donnait une hospitalité plus splendide et plus gra-