Aller au contenu

Page:Young - Les Nuits, trad. Le Tourneur, t. 1-2, 1827.djvu/22

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

la douleur vint étouffer dans son cœur tous les désirs de fortune et l'enfoncer dans la solitude.

Vers l'année 1741, la mort en moins de trois mois lui enleva sa femme, et les deux enfans qu'elle avait eus de son premier mari. Il les aimait aussi tendrement que s'ils eussent été les siens, et ils le méritaient. Ces trois pertes successives accumulèrent les larmes dans le cœur de ce vieillard, âgé de près de soixante ans. Dégoûté du monde et de la vie, privé tout-à-coup de tout ce qu'il avait de plus cher, c'est alors que, pour ainsi dire, il descendit vivant dans la tombe de ses amis, s'ensevelit avec eux, et tirant le rideau entre le monde et lui, il ne chercha plus ses consolations que dans cet avenir où l'homme triste et malheureux se plaît à se réfugier. Ses larmes ne furent pas stériles pour sa gloire; et son génie, loin d'être oisif et muet dans sa douleur, semblait attendre ces trois coups de foudre pour s'élancer dans le sombre empire de