Page:Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/140

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campagne devient plate et sans intérêt. Arrivé à Bordeaux, à travers un village continuel. — 29 milles.

Le 26 — Malgré tout ce que j’avais lu et entendu sur le commerce, la richesse et la magnificence de cette ville, mon attente fut grandement surpassée. Paris n’y répondit en rien, car on ne saurait le comparer à Londres ; mais il ne faut pas mettre Liverpool en parallèle avec Bordeaux. La chose principale, que l’on m’avait le plus vantée, est ce qui m’a frappé le moins : je veux dire le quai, remarquable seulement par sa longueur et l’activité dont il est le théâtre, choses que l’étranger n’apprécie guère, si la beauté y fait faute. Les maisons qui le bordent sont régulières, sans grandeur ni élégance. C’est une berge boueuse, glissante, sans pavés par intervalles, embarrassée de tas de boue et de pierres ; on y amarre les alléges servant à charger et décharger les navires, qui ne peuvent s’approcher de ce qui devrait être un quai. On y trouve toute la saleté et les ennuis du commerce sans l’ordre, l’arrangement, la grandeur d’un beau port. Barcelone est unique à cet égard. En m’avançant jusqu’à blâmer les bâtiments qui bordent la rivière, il ne faut pas supposer que ce soit le tout ; la demi-lune placée sur la même ligne est bien mieux. La place royale, avec une statue de Louis XV au centre, est très belle ; les maisons qui l’encadrent ont de la régularité et un grand air. Mais le quartier du Chapeau-Rouge est réellement magnifique, composé de beaux hôtels construits, comme le reste de la ville, en pierre de taille blanche. Il confine au Château-Trompette, qui occupe près d’un demi-mille du rivage. Ce fort a été acheté au roi par une compagnie de spéculateurs, qui l’abattent dans l’intention d’y tracer une place et plusieurs rues avec dix-huit