Page:Yver - Mirabelle de Pampelune.djvu/184

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Le sous-lieutenant Lecointre s’est assis dans une niche de son abri et, les coudes sur ses genoux, essaye de rêver une minute. Mais impossible. L’image de Louise, il ne peut même pas la ressaisir. Elle flotte et s’efface. D’ailleurs tout va finir. La mort est là, se joue de lui, de ses amis, de ses hommes. Un éclatement de marmite sur le parapet vient d’ensevelir, à côté, trois soldats de sa section ; on travaille à dégager leurs cadavres, espérant en vain que la vie ne les a pas quittés tout à fait. Au coup prochain, ce sera son tour. La vie lui distille les dernières gouttes amères de la coupe. Un peu plus tôt, un peu plus tard ! On ne peut même pas concevoir exactement l’horreur de cette minute.

En voyant M. Henri ainsi prostré, vous pensez peut-être avec une pointe de regret : « Voilà un héros déchu qui a perdu de son héroïsme. » Détrompez-vous. Il est aussi beau pour M. Henri et pour les milliers d’hommes tapis avec lui dans ce secteur d’enfer, de s’accroupir ainsi dans l’immobilité, sous les marmites, pendant six nuits et six jours