Page:Yver - Mirabelle de Pampelune.djvu/20

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Un peu confus de troubler ce bel entretien, M. Henri s’avance dans sa blouse de commis et prononce d’un ton morne :

— Deux francs soixante-quinze à recevoir !

Ce qui se passe dans les yeux de mademoiselle Louise est intraduisible. À regret, elle se lève ; elle toise le commis qui représente des intérêts si mesquins, toute la médiocrité du petit commerce où s’étiole sa vie. Elle vient à la caisse ; la main rouge d’un collégien y dépose une pièce de cinq francs ; elle rend la monnaie, en pensant à Pampelune. Pampelune, Roncevaux, Roland, Charlemagne ; puis Mirabelle en corselet d’argent, la tête entortillée d’une touaille de soie blanche…

— C’était, reprend des Assernes près de qui mademoiselle Louise est revenue s’asseoir, la fille d’un très riche seigneur de Navarre, nommé Gascon Sanse. Elle était douée de mille beaux talents. Le chroniqueur anonyme qui raconte son histoire dit « qu’elle chantait les plus belles chansons et les plus délectables et mélodieuses qui oncques fussent ouïes ni en chanson ni en viole ». Tout Pampelune avait