Page:Yver - Mirabelle de Pampelune.djvu/231

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burlesques, vont ainsi joyeusement à la mort. D’autres troupeaux, quand on les y mène, ignorent qu’ils y vont. Il n’y a que l’homme, Nénette, qui puisse en même temps connaître qu’il y va et s’y rendre de ce front serein. Il n’y a que l’homme qui soit ainsi maître de sa vie et libre de la donner pour une cause plus grande que lui-même.

Bien calée sur son petit derrière, l’oreille inclinée, Nénette reprend à sa façon :

— Mon adjudant, si l’homme n’était pas, dans la création, un être admirable, est-ce que nous, les chiens, nous nous désintéresserions totalement de ceux de notre race, pour nous vouer uniquement à lui ? L’homme, il n’y a que lui qui compte pour nous, parce que nous le connaissons bien. L’homme, vous en parlez comme un aveugle des couleurs. Il n’y a que le chien qui le connaisse vraiment et sache de quoi il est capable.

Là-dessus, un choc formidable renverse Nénette sur la paille. Les freins crient. Un arrêt brutal du train : c’est le petit jour. On est dans une grande gare de Normandie. La porte