et mélancoliques, les regards des deux commis, dont elles se soucient peu d’être entendues.
Dieu merci, avant d’arriver à l’écluse d’Ablon, les pêcheurs ont l’idée d’aller s’amarrer à une île verte et touffue. Les voilà préparant leurs engins. Le moteur s’est tu, le canot redressé. Louise et Édith vont s’asseoir à l’arrière. Louise enfin peut s’épancher.
— Tu ne sais pas, ma chérie. Monsieur des Assernes est arrivé hier de Toulouse. Il est venu droit chez nous pour nous lire quelque chose d’extraordinaire, de merveilleux, de passionnant : c’est un roman de chevalerie qu’il a trouvé sur de vieux parchemins, l’histoire de Mirabelle de Pampelune.
— Tu as de la chance, toi ! soupire Édith.
Louise, en se rengorgeant, continue :
— Le comte Mainfroy de Catalpan, neveu du comte de Foix, était follement amoureux de Mirabelle ; mais c’était le chevalier le plus belliqueux de son temps. Monsieur des Assernes, hier, au dessert nous a lu ce qu’il a commencé d’écrire sur la croisade que fit ce chevalier. Ah ! ma chérie ! quel être prodigieux !