Page:Yver - Un coin du voile.djvu/110

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jeunesse, cette fille-là pense plus à son métier qu’aux hommes.

— Si c’est pas malheureux ! dit Amélie. Madame Louise, l’infirmière de la salle, prononça :

— J’y mettrais pas ma main à couper, madame Hortense ; mademoiselle Johannah ressemble à l’autre. Si vous aviez trop à faire à la buanderie, vous avez pu vous tromper.

Elle éclata de rire.

Un infirmier dit, sentencieusement :

— C’est des gosses. Faut les laisser s’amuser. Apparemment que dans leur pays, c’est comme chez nous.

Johannah triste et lente continua sa ronde de nuit dans le grand silence sombre de l’hôpital. Elle avait vingt ans. Elle était née à Bergen, et devenue orpheline elle avait voulu venir à Paris, emportée plus encore que guidée par son désir passionné d’être médecin. Et, dans son sillage, elle traînait sa sœur, son aînée de deux ans, la douce et légère Fridja, un enfant, un oiseau, qu’elle avait surveillée, choyée, dominée, bourrée de livres, excitée impérieusement au