Page:Yver - Un coin du voile.djvu/111

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travail examen par examen, jusqu’à l’avoir fait recevoir interne, ici, dans ce grand hôpital de province, après l’échec de Paris. Fridja était paresseuse, rêveuse et faible. La mâle fermeté de Johannah l’avait maîtrisée. Elle était romanesque et ardente ; Johannah l’avait gardée comme un homme garde sa fille, farouchement, mais naïvement, et Fridja avait aimé ce jeune interne, Benoît, dont parlaient les infirmières.

Johannah restait pure et forte comme le montrait son beau visage, mais depuis l’aventure de Fridja une tristesse sans fond l’accablait. Elle avait usé de son irrésistible domination pour dénouer le lien frivole qui unissait les amoureux, pour faire passer Benoît dans un autre hôpital, et son idée fixe, la préoccupation qui la rongeait était de cacher la faute de sa sœur, d’en étouffer le moindre souvenir. Elle allait, dans son souci de l’honneur familial, jusqu’à s’aveugler elle-même sur le retentissement qu’avait eu l’affaire. Elle se disait : « Qui l’a su ? » — « Qui l’a su ? » répétait l’insouciante Fridja qui se figurait par cette incurie