Page:Yver - Un coin du voile.djvu/125

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magnifique. Ses yeux cherchèrent Vergeas : il était auprès d’elle, ne l’ayant pas quittée.

Le soir, quand le jour tomba, elle sentit la solitude glaciale de la chambre où les deux lits jumeaux, accotés au mur, rappelaient la vie d’autrefois. Aux porte manteaux de ce logis grave des étudiantes, pendaient, tristes et lamentables, les deux blouses blanches, semblables, et, en revêtant l’encolure, les grands cols empesés auxquels aliénaient encore, toutes pareilles, les deux cravates rouge cerise, celle que Fridja avait dénouée de sa gorge blessée, le soir qu’elle s’alita, et celle que, huit jours plus tard, Johannah laissait pour prendre le deuil.

De ce couple touchant que l’hôpital avait uni d’un mol : « Ces demoiselles Fjord, » Johannah se sentait demeurée comme une épave. Elle comprenait maintenant que, jusqu’ici, sa raison d’exister avait été sa sœur, et l’amertume d’être seule dans la vie l’abreuva. Elle devait pleurer ici, sans témoin, sans une amie, et personne ne lui avait donné ce dont les femmes ont tant besoin quand elles souffrent : une caresse.