Page:Yver - Un coin du voile.djvu/13

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lyste, impitoyable observateur de la vie des autres, il en avait été conduit à mépriser, non point l’amour, mais ses illusions, ses faux-semblants et leur fragilité. D’ailleurs, se prêtant une certaine sécheresse d’âme, après l’étouffement de tant de choses jeunes et tendres en lui, il n’attendait pas d’amour.

Près de l’établissement où il professait, le jardin mortuaire et merveilleux qu’est le Père-Lachaise étalait ses pentes broussailleuses, ses allées de marronniers, croisées d’allées d’acacias, ses dômes, ses coupoles, ses chapelles blanches, ses mausolées orgueilleux, ses ifs, ses cyprès, ses draps souples de lierre, ses fouillis de verdure, ses tombes grecques et sa statuaire funèbre : amphithéâtre silencieux et superbe dressé au-dessus de Paris qu’il menace et attend. C’était, pour le jeune maître d’histoire, un lieu de promenade mystérieusement attirant. Son cours fini, légèrement échauffé par la flamme, qu’artiste inconscient, il mêlait à sa parole, le cerveau en fièvre, les nerfs tendus, il cherchait de suite une vaste sensation d’air vif que la rue ne lui donnait pas.