Page:Yver - Un coin du voile.djvu/147

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Sous votre plume, elle m’est apparue telle qu’elle doit être en réalité, cette Friquette : grande, amincie par ses robes serrées, flexible, le teint délicat, l’œil ardent, sous le chapeau tapageur, auréolée par la chevelure étrange dont j’exigerais, moi, l’authenticité. — La femme qui sait refaire après Dieu les yeux qu’il lui a donnés, peut prendre pour ses cheveux la couleur excentrique que bon lui semble. Passons.

Je la vois, dans sa jaquette à la mode devancée, audacieuse et garçonnière, pérorer chez votre sous-préfète ; je vois les hommes, les jeunes hommes qui l’écoutent et font semblant de la courtiser, se détourner pour rire, et, moins respectueux que vous de ce pauvre caractère inculte, en faire des gorges chaudes. Je la vois, avec son orgueil ridicule de Parisienne, taquiner d’ironie et de dédain vos tranquilles femmes de Pavillon ; je la vois s’exalter, s’aventurer trop loin, et dire, pour surprendre ces dames, des choses qu’elle voudrait prétendre savoir, et qu’elle devrait paraître ignorer.

Et c’est vous, mon bon Pierre, si sincère et si loyal, si plein de réserve et de bonnes