Page:Yver - Un coin du voile.djvu/149

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père que vous ne tirerez pas de ma franchise le droit d’être sévère.

Friquette était hier à la sous-préfecture, vêtue d’une idéale étoffe Liberty qui semblait une robe de songe, avec ses pâles teintes, ses fleurs effacées, estompées de couleurs mourantes, ses grandes fleurs irréelles, étranges, qui sont bien du jardin de Friquette, l’étincelante et fantasque Friquette !

On prenait le thé ; je m’étais instinctivement rapproché d’elle, plein d’une angoisse invraisemblable et tremblant d’entendre sa première parole qui allait être folle ou sage. Comme les propos couraient le salon sur le futur petit d’Arnoy qui va, paraît-il, d’ici quelque temps, faire son apparition dans le monde, Friquette, qui gardait depuis un grand quart d’heure le silence, lança tout à coup cette boutade :

— Des enfants, s’il vous plaît, préservez-moi, Seigneur !

Adossée au chambranle de la cheminée, elle avait parlé d’une voix haute et claire ; et comme toutes les têtes se retournaient, elle profita de l’attention pour continuer :