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Page:Yver - Un coin du voile.djvu/220

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comprit la raison de sa peine. Il partit fort troublé. En son absence, Hélène pleura. N’était-il pas de son devoir de briser ce mariage ? Elle avait lu des exemples d’héroïsme pareil, mais ce qui la remplissait autrefois d’enthousiasme la glaçait de peur, aujourd’hui, jusqu’à la racine des cheveux. Le lendemain, quand à l’heure de la promenade, elle noua la cravate de son cher vieux, elle le prit aux épaules dans un geste de passion, et l’embrassa si longuement qu’il en riait de plaisir et d’orgueil paternel.

Elle sentait que dans sa vie une cassure nette allait se faire. Sous son voile de mariée, s’ensevelirait pour toujours son passé, et une existence différente commencerait, distincte de celle d’autrefois, une vie nouvelle où l’attendraient une atmosphère nouvelle, une âme nouvelle, un cœur nouveau.

Alors, que ce long passé de vingt-huit années fût pour elle une chose finie, elle n’y pouvait souscrire. Trop de souvenirs chers, de réminiscences puériles et tendres habitaient son cœur, l’emplissaient encore de ce passé