Page:Yver - Un coin du voile.djvu/241

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» — Et vous le soignez ?

» Elle fit, de plus en plus mystérieuse :

» — Un reste de pitié… Je ne vois plus là qu’un homme qui meurt !

» Je jetai un regard sur l’appartement de pauvres qu’elle me fit traverser : une étroite cuisine où les fillettes terrifiées par l’ambiance de la maladie ne jouaient plus ; la salle démeublée, si triste avec ses chaises en bois blanc rangées autour de la table ; la chambre…

» Dans le lit riche, qui, du naufrage restait l’unique épave, au creux du matelas, le corps crispé du mari haletait. Il avait la toux déchirante que connaissent seuls les pleurétiques, et la souffrance de cette toux le tenait plié sur lui-même, sa longue barbe blonde écrasée sur sa poitrine. Sa fièvre semblait brider le drap.

» Nous autres, médecins, nous avons vite fait de créer de l’impersonnalité en présence de la maladie, et quand j’auscultai le méprisable individu, l’oreille collée à son thorax, aux aguets de ce cœur d’homme où s’étaient passées tant de choses inavouables, j’avoue que je n’écoutais plus que le rythme et le souffle de