Page:Yver - Un coin du voile.djvu/262

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

réclamait leur appétit, et les charmantes filles devenaient alors bien réelles.

La petite Maud, elle, m’échappait ; plus fuyante encore que ses sœurs, elle était insaisissable. J’apercevais parfois sa jupe rouge dans un coin du parc, et puis, sans que je pusse savoir comment, je voyais aussitôt sa tête ébouriffée passer par la fenêtre d’en haut d’où l’on découvre la Seine jusqu’à la Barre-y-va.

Elle me faisait curieuse. Quand ses sœurs s’en allaient en bande visiter le pays, elle restait et s’enfermait dans sa chambre avec un livre, et ce livre la suivait partout. Parfois elle se couchait sur le gazon, les mains dans les ondes mousseuses de ses cheveux libres, et l’éternel livre devant elle. Quand elle relevait la tête, elle était toute rouge, avec des perles de sueur aux tempes, de la fièvre dans les yeux, et ses lèvres s’appliquaient à dire des mots.

Quand j’ouvris par hasard le livre de mystère, je vis… une grammaire française.

Studieuse, sauvageonne, moins belle que Lilian, qu’Edith et que Mabel, mais avec des yeux exquis, sans couleur, où le ciel mettait du