Page:Yver - Un coin du voile.djvu/263

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bleu, et le reflet de l’eau des lueurs vertes, elle en vint à m’intéresser plus que ses sœurs et je voulus l’apprivoiser ; cela ne paraissait pas difficile ; par deux ou trois caresses données en courant, j’avais déjà fait naître dans ses yeux d’infiniment tendres regards qui m’encourageaient, quand une affaire autrement grave surgit dans notre vie : Jean arrivait. Il fallait préparer le piège, et ma devise était plus que jamais d’actualité : Marions Jean ! Marions Jean !

Il arrivait au bout de trois jours par le petit chemin de fer joujou qui traîne ses wagons tout le long de la Seine, et nous l’attendions à midi sur l’éblouissante route blanche où j’avais conduit inquiètement mon bataillon. Mes yeux presbytes le virent venir de loin, extrêmement soigné dans son négligé de voyage ; il n’avait pas oublié ses séductions à Paris, et il appuyait mes espérances de ses luisants regards railleurs, de son élégance habilement modérée, de toute sa personne parfaite qui le faisait nommer par ses intimes : Don Jean.

Édith ou Lilian, laquelle regarderait-il ? Lilian souriante, ou la discrète froideur d’Édith ?