Page:Yver - Un coin du voile.djvu/274

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Maud avec des airs de grand frère. C’était chose si subtile et si délicate que leur amour, qu’il eut le tact de ne point dire un mot ; ils se lancèrent seulement un mystique regard par-dessus la table, où personne non plus n’osait parler, tant ce silence que parfumaient les fleurs était mystérieux et doux.

Une heure après, mes quatre hôtesses, qui avaient déniché le matin chez un pêcheur un joli canot peint à neuf, remontaient la Seine à grand effort d’avirons. Jean fumait à la terrasse, et je l’avais suivi, quand elles passèrent devant nous, lentement, chaque avancée de barque étant un effort sur le courant. Édith et Mabel ramaient, élégantes, flexibles, ondulantes dans le balancement laborieux de leur exercice. Lilian debout, son châle clair claquant au vent, tenait la barre, et la petite Maud très absente de là, le dos tourné à ses sœurs, crânement coiffée de sa casquette de garçon, rêveuse, poète, vivant au delà, plus chimère que jamais, sur ces eaux fuyantes comme elle, laissait ses yeux errer vers les campagnes vertes des bords.