Page:Yver - Un coin du voile.djvu/30

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riait d’abord comme la veille. Ainsi que toutes les femmes qui aiment, elle était disposée à trouver infiniment d’esprit aux plus futiles propos de son mari. Mais cette fois, lorsqu’elle voulut le ramener aune conversation sérieuse, elle eut mille peines à lui faire abandonner sa plaisanterie, et il inventait des propos que le président lui aurait tenus.

Le troisième jour — elle devait s’en souvenir toute sa vie — c’était un jeudi, un radieux matin de février. Elle était à sa table de travail, crayonnant, d’après un croquis pris la veille, une illustration pressée. Elle chantait à mi-voix son allégresse d’épouse, sa confiance dans la vie. Son mari était sorti pour une répétition ; elle l’attendait. À la cuisine, la servante apprêtait le repas ; une fumée odorante de sauce épicée se répandait dans l’appartement, se jouait dans chaque rais de soleil. On préparait un mets favori de Louis ; Marguerite elle-même de temps à autre en allait surveiller la cuisson. Et le cœur lui battait, sans qu’elle sût si c’était au souvenir des baisers du départ ou dans l’attente de ceux du retour.