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Page:Yver - Un coin du voile.djvu/44

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sible de tout ce qu’éveille en une femme l’amour d’un homme qui l’adore. Aujourd’hui, elle avait été aimée, fugitivement, comme dans un rêve, et il lui venait, à penser aux délices finies, des tristesses déchirantes. Parfois, elle se surprenait à serrer dans une fièvre désespérée, les mains molles et inertes de son mari.

— M’aimes-tu, disait-elle, m’aimes-tu ?

Il répondait :

— Laisse-moi, j’ai faim.

Alors, elle retombait, sanglotante, éperdue, sur un siège proche, et lui s’amusait à voir couler ses larmes.

Un jour, en la regardant, il pleura aussi. Son visage ruisselait, des sanglots de petit enfant l’étouffèrent. Elle tressaillit, s’approcha, essuya ses yeux, le couvrit de baisers, s’imaginant que c’était un chagrin réel qu’il éprouvait.

Il était devenu d’une docilité et d’une douceur constantes. Elle le promena. Il paraissait effrayé dans la rue, et se serrait contre elle, demandant sa protection. Marguerite eut alors des sensations de fierté délicieuse à tenir ainsi sous sa garde, cet homme si vigoureux. La