Page:Yver - Un coin du voile.djvu/45

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santé physique du fou s’affermissait déjà ; les promenades à petits pas, sur le trottoir, au soleil, achevèrent de le reconstituer. Il s’était baigné deux années dans l’atmosphère de cette femme, il avait été soumis à ses soins, à l’action de sa paix bienfaisante, à son hygiène divine et inspirée ; il sortait de ses mains comme d’une seconde gestation, rénové, naissant à une vie physique nouvelle, les nerfs calmés, les moelles raffermies, s’essayant à des phrases puériles. Un soir, il sourit.

— Est-ce qu’il ne va pas guérir, demanda au médecin Marguerite, tremblante, anxieuse, enfiévrée de ce désir de guérison.

Le docteur hocha la tête, incertain. Elle demeura plus navrée, après la fin de cette lueur d’espoir.

Alors, lasse, plus découragée devant cette vigueur reconquise qu’elle ne l’avait été devant le malade exténué, voyant désormais plus l’insensé que l’infirme, elle souffrit comme jamais. Elle se disait souvent : « J’aurais cependant si bien su être heureuse ! » Et de quels précaires et amers bonheurs elle devait désor-