Page:Yver - Un coin du voile.djvu/51

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ensemble des contemplations muettes, les plus hautes régions de l’amour. Et c’était fini, fini pour jamais, et lui était encore là, pourtant, comme autrefois, debout et la regardant.

Un élan de pitié, comme elle en avait parfois pour le malheureux, la saisit ; elle leva sur lui des yeux pleins de compassion tendre, murmurant, songeant tout haut :

— Je t’aime bien, tu sais, pauvre ami !

Elle sentit à ce moment les yeux du fou plonger étrangement dans les siens. Oh ! ce regard incompréhensible, comme il la troublait, avec son vide, son inconnu, sa détresse ! Puis, à une convulsion légère des lèvres qu’il avait depuis sa folie, elle devina qu’il allait parler, et comme depuis deux ou trois jours, il n’avait pas proféré un mot, elle l’écoutait souriante, indulgente à ses divagations.

Il prononça :

— Marguerite !

Une secousse la mit debout, terrifiée à demi, et elle le regardait en frissonnant ; c’était la première fois qu’il disait ce nom depuis deux ans. Quel écho se réveillait dans sa mé-