Page:Yver - Un coin du voile.djvu/65

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vraiment la difficulté de vivre. Ce ne fut pas le découragement, mais un grand affaissement moral et la fin de l’emballement juvénile. Nul ne la remarquait. Elle goûta la fadeur de sa propre médiocrité, désespéra d’arriver. Sa plus grosse affaire fut celle-ci : elle plaida pour son concierge qui lui remit un billet de cinquante francs.

Après avoir dédaigné naguère pour la profession libérale le métier d’institutrice, elle chercha des leçons de Droit et parvint à en donner à des jeunes filles du monde.

Elle s’émaciait un peu ; ses joues prenaient une jolie pâleur ; elle était délicate et distinguée. Grâce aux leçons, elle avait pu libérer de sa pension mensuelle l’instable budget paternel, et ç’avait été la première grande joie de sa carrière. Parfois, à l’instruction d’une petite vagabonde, sa cliente, son cœur sevré de tendresses s’éveillait en sursaut ; et elle devait se retenir d’embrasser, même de chérir vainement ce jeune être indigne…

… Et aujourd’hui, une femme chez qui tout trahissait les élégances de la vie parisienne