Page:Yver - Un coin du voile.djvu/96

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et un air de reproche, ces gens-là couperont toujours des cheveux en quatre pour se torturer mutuellement. Jamais ils ne seront heureux ensemble, et ne vaudrait-il pas mieux achever radicalement la rupture, puisqu’elle est si près de se faire, que de l’ajourner en soumettant ce ménage à de nouveaux tourments ? Et puis, après tout, la conduite de ma cliente me regarde-t-elle ? Je plaide un divorce qu’on me confie : est-ce à moi de juger si ces époux se séparent à tort ou à raison ? Alors on ne plaiderait jamais de divorce. Oh ! Minette, comme tu me regardes ! Qu’est-ce que je fais de mal ? C’est le métier qui veut cela… Seulement voilà, j’ai tant envie de plaider, tant envie ! Est-ce que mon jugement est libre, et mon désir, par hasard, ne prendrait-il pas pour m’égarer le détour d’une casuistique perverse ? Ce serait si dur, à présent, de voir s’éteindre la belle lumière qui ensoleillait ma vie depuis deux mois, de retourner à la pauvreté sombre, définitive, de naguère ! Si tu pouvais penser et parler avec ta simplicité lucide de bête, que me dirais-tu ? Peut-être que ces deux êtres, d’esprit éga-