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Page:Zévaco - Le Capitan, 1926.djvu/149

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groupes étranges leur apparaissaient : tire-laine embusqués ou lentes patrouilles du guet. Alors Giuseppa tremblait et invoquait la Vierge et les saints. Giselle tout à coup s’arrêta, regarda autour d’elle et vit que l’instant était propice.

Elles se trouvaient un peu au-dessus du Pont-au-Change, dont les maisons à toits aigus et à croisillons de bois enjambaient la Seine.

"Il faut nous quitter ici ! dit Giselle avec fermeté. Ne résistez pas, c’est inutile. Vous serez chassée, c’est probable. Mais si vous voulez vous présenter demain à cette même place, vous y trouverez quelqu’un qui vous remettra cinq mille livres. Adieu !"

D’un mouvement rapide elle se débarrassa de Giuseppa et fit quelques pas en revenant vers le pont. Giuseppa n’avait pas dit un mot, pas jeté un cri. Seulement, un sourire funèbre balafra comme un éclair son visage. Elle ne fit pas un mouvement pour suivre Giselle. Seulement, elle se pencha pour voir ce qui allait se passer dans ce recoin de ténèbres et de crimes, et elle vit ! Deux, trois, quatre ombres qui surgissaient et barraient la route à la fugitive…

Ce fut rapide comme une vision. Pas de lutte, pas de cris. Ces ombres entourant Giselle, cela forma un groupe sinistre qui s’agita, tourbillonna dévala vers le fleuve, vers l’eau noire qui s’engouffrait sous les arches ouvertes comme des gueules fuligineuses d’où sortaient des plaintes. Puis il y eut un cri, un seul, une clameur de détresse. Et, dans le même instant, le bruit soyeux de l’eau qui s’ouvre et se renferme. Puis, ce fut tout. Giuseppa, à demi courbée, penchée sur cette scène d’horreur ; Giuseppa le front mouillé de sueur, les yeux exorbités, se redressa alors lentement. Les ombres la rejoignirent, et l’une d’elles murmura :

"C’est fait !..."


Notes :


Au Louvre, tout était silence et mystère. Léonora Galigaï, retirée dans l’appartement qui lui était réservé près de celui de Marie de Médicis – car souvent son service de première dame d’honneur de la reine l’obligeait à passer la nuit dans le château – Léonora Galigaï, assise dans un fauteuil, écoutait le silence et regardait le mystère. Elle venait d’éteindre la lampe qui brûlait près d’elle sur le marbre d’une petite