Page:Zévaco - Le Capitan, 1926.djvu/180

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contre l’idée qui m’était venue. Tout à coup, j’entends des vociférations lointaines, comme venues des entrailles de la terre.

— Je sais ce que c’était. Passe, dit Capestang.

— Le bruit s’apaise soudain. Je m’étais tapi dans une encoignure de corridor. Au bout d’une heure environ, n’entendant plus rien, j’allais sortir de mon trou, lorsque je vois le corridor s’éclairer. Je me rejette dans mon réduit, c’est-à-dire au fond de ce cul-de-sac qu’était ce corridor. Et alors, j’entends des pas qui montent un escalier. Puis apparaît un vieux serviteur tout de noir vêtu, portant un flambeau à trois cires. Puis un homme, un seigneur de haute mine, donnant la main à une demoiselle d’une éclatante beauté, mais triste, pâle comme une morte.

— Giselle ! Giselle ! cria le chevalier en lui-même.

— Tous ces gens, monsieur, passèrent comme des ombres au bout de mon corridor, c’est-à-dire dans un long couloir qui faisait croix avec le mien. Eux passés, je m’avance, je laisse juste passer mon œil droit au détour du mur, et je les vois qui entrent dans une pièce tout au fond. J’allais me retirer assez mécontent de mon expédition, lorsque j’aperçus... quoi ? Notre Laffemas qui, à dix pas de moi, dans le long couloir, sortait d’une encoignure pareille à la mienne et se dirigeait vers la pièce où étaient entrés le seigneur et la demoiselle. Notre homme s’est mis à écouter, l’oreille collée à la porte. Moi, monsieur, je n’entendais rien. J’enrageais. Mais j’étais décidé à suivre jusqu’au bout le Laffemas, pour l’étrangler un peu. Tout à coup, donc, je le vois qui recule vivement. Il descend un escalier. Je descends derrière lui. Il franchit le mur à l’endroit où il avait posé sa planche. Je franchis. Et je le vois posté à l’angle du quai et de la rue Dauphine. J’allais sauter sur lui. À ce moment, j’entendis le bruit sourd d’un carrosse qui se mettait en marche, partant me sembla-t-il, de la porte de l’hôtel...

— Ah ! fit vivement Capestang. Et où a été ce carrosse ?

— C’est justement ce que j’ai voulu savoir, monsieur. Je me suis dit que la chose vous intéressait sûrement. Il paraît qu’elle intéressait également le Laffemas. Car il s’est mis à courir derrière le carrosse, et moi, derrière lui à distance. La voiture franchit le Pont-Neuf, tourne à droite et entre enfin dans la rue des Barrés, non loin de Saint-Paul. Je vois Laffemas s’arrêter à l’angle de la rue en même temps que j’entends le carrosse s’arrêter aussi. Puis, presque aussitôt, la voiture repart et Laffemas, alors, s’avance dans la rue. Je me rapproche de lui. Et j’arrive sur notre homme au moment où il murmurait : « C’est là. Bon ! – Monsieur, lui dis-je en l’abordant, deux mots. – Holà ! cria-t-il, je vous préviens que je n’ai pas un denier sur moi. – Monsieur, je ne suis pas un tire-laine, et n’en veux pas à votre bourse. – À quoi en avez-