Page:Zévaco - Le Capitan, 1926.djvu/407

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des cris déchirants, et il comprit que ses cris s’étouffaient dans cette cage ; il vit qu’il n’y avait aucune ouverture par où il pût fuir, excepté la porte de chêne bardée de fer, inexpugnable. Pendant deux heures, le malheureux jeune homme se débattit ainsi ; il pleura ; il supplia ; eut des crises de fureur effrayantes et des minutes d’abattement mortel ; et enfin, tout sanglant, il tomba sur le parquet, à bout de forces, et s’évanouit en murmurant :

"Marion ! Ma chère Marion !"


Le lendemain, vers deux heures de l’après-midi, Laffemas, après une longue conversation avec son maître, sortit de cet hôtel du quai des Augustins où étaient enfermés Marion Delorme et Cinq-Mars. Un pâle sourire crispait ses lèvres ; il y avait un peu de rouge à ses joues ordinairement couleur de cendre ; son œil terne s’éclairait vaguement ; tous ces signes révélaient chez lui une intense jubilation.

"Me voici monté en grade. Je crois que je tiens monseigneur. L’algarade de cette nuit où j’ai fait coup double m’a mis hors de pair. Un trait de génie ! Le mot est de monseigneur... Maintenant, mon petit Laffemas, il s’agit d’espionner un peu ce soudard, ce bretteur, ce mangeur de royaume, ce pourfendeur de couronne qu’on appelle Guise. Peste ! la chose est délicate. Bah ! que je trouve seulement deux lignes de la main du noble duc, et je le fais pendre ! Et une fois Guise pendu, ou tout au moins embastillé, j’attaque le gros morceau. Concini ? Hum ! Le taureau d’airain ! L’hydre aux cent têtes ! Bah ! je verrai, je trouverai. Ce Concini, au fond, est un imbécile, et moi, je..."

À ce moment, il se sentit touché à l’épaule par-derrière ; il se retourna et se vit en présence de Rinaldo, dont le regard pétillait de malice. Rinaldo était accompagné de trois ou quatre sbires.

"Hé ! bonjour, mon cher monsieur de Laffemas ! Per bacco, c’est un vrai plaisir pour moi de vous rencontrer.

— Monsieur le comte de Lérouillac, fit Laffemas, non sans ironie, je suis bien votre serviteur.

— Pas du tout ! C’est moi qui suis le vôtre ! dit Rinaldo. À telles enseignes que je vous ai attendu trois heures durant sur le quai des Augustins. Même s’il se fût agi de mon illustre