Page:Zévaco - Le Capitan, 1926.djvu/53

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

était entré, se tenait le même huissier qui l'avait introduit.

"Alors, fit Capestang, tu dis que mon audience est terminée ? Je puis m'en aller comme cela ?

― Oui, monsieur, à ce qu'il paraît, fit le suisse de cathédrale très majestueux.

― Eh bien, voici deux écus, mon cher ami..."

Capestang respira un grand coup, et sans oser trop approfondir ce qui lui arrivait, tendit en effet deux pièces d’argent à l’huissier qui les empocha.

"Seulement, tu auras l’extrême complaisance de me montrer le chemin.

― Facile ! dit le suisse. Entrez là, ouvrez cette porte en face de vous. Suivez le couloir tout droit. Descendez le petit escalier. Vous serez dans la cour."

Le chevalier obéit. Il passa dans la pièce nue et dallée où il avait attendu. Seulement, comme il se retournait pour interroger l’huissier, il ne le vit plus : la porte du cabinet s’était refermée. Alors, Capestang sentit la sueur pointer à son front. Ses yeux, tout d’instinct, allèrent chercher ces éraflures qu’il avait remarquées aux murailles, ces taches noirâtres qu’il avait vues sur les dalles. Puis, secouant la tête, et plein d’un doute effrayant, il se dirigea vers cette porte qu’on venait de lui signaler et qu’il se rappelait parfaitement avoir essayé en vain d’ouvrir.

Capestang fut secoué d’un rapide frémissement d’espoir. Cette fois la porte s’ouvrait ! Dans la même seconde, il recula de deux pas : dans le couloir étroit et sombre, dans l’encadrement de la porte ouverte il y avait un homme ! Et cet homme c’était Rinaldo !

— Ah ! ah ! fit le chevalier, je commence à comprendre !

Rinaldo s'avança, le sourire fielleux, la face insolente, le regard chargé d’insulte.

"Entrez, messieurs, entrez, dit-il, je vous présente M. Adhémar de Trémazenc de Capestang, avec qui vous avez eu une petite discussion dans le bois de Meudon."

Cinq hommes entrèrent. Le dernier referma la porte du couloir. Cinq hommes vigoureusement découplés, marchant d’un pas nonchalant, et retroussant leurs moustaches.

Capestang s’accula à un angle de la pièce. L’œil aux aguets, les nerfs tendus, la main à la garde, prêt à dégainer, immobile et froid, souriant, étincelant, il était là comme la personnification du Défi. Les spadassins s’étaient rangés en face de lui, contre la muraille. Ils semblaient parfaitement paisibles... l’un d’eux renouait une de ses aiguillettes, un autre fredonnait à demi-voix une complainte d’amour, un autre se mirait dans une petite glace de poche et peignait sa moustache, et à cause de cette tranquillité, la scène était effroyable.

"Monsieur de Capestang, dit Rinaldo, je vous présente : moi, d’abord, signor Rinaldo. Rinaldo sans plus. Vous avez trop