Page:Zévaco - Le Capitan, 1926.djvu/537

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

On savait que de graves événements se préparaient. On savait que le jeune Cinq-Mars, arrêté dans la nuit, était dans une salle voisine avec le duc et la duchesse d’Angoulême, arrêtés dans la matinée. On savait que vers trois heures, Vitry était revenu de l’hôtel d’Ancre, porteur de nouvelles inconnues, que le roi et ses conseillers intimes s’étaient alors réunis en une longue conférence dont rien n’avait transpiré - et que, depuis ce moment, Vitry attendait dans la cour avec vingt gardes. Qu’attendait le capitaine ? On l’ignorait. Que s’était-il passé à l’hôtel d’Ancre ? On l’ignorait, et nul ne pouvait y aller voir, vu qu’il était défendu d’essayer de sortir du Louvre sous peine de Bastille. Une morne inquiétude pesait sur le Louvre.

Enfin, il faut ajouter qu’à la grande inquiétude de Richelieu et de Luynes, Louis XIII avait accordé une audience particulière à sa prisonnière, la duchesse d’Angoulême, et que cette audience avait duré près d’une heure. Après quoi la duchesse avait rejoint le duc dans la salle où il était gardé à vue avec le marquis de Cinq-Mars, et le roi, tout pensif, avait repris son poste près de la fenêtre.

Au moment où nous entrons au Louvre, il était, comme nous l’avons dit, à peu près dix heures.

Le roi, dans sa rêverie muette, le front appuyé sur sa main pâle, songeait :

"Ainsi donc, il voulait me tuer ! Ainsi donc, Concini voulait mon trône ! C’est lui... c’est Léonora qui a enivré le cheval qui devait me tuer sur la route de Meudon. C’est lui, c’est elle qui a versé le poison dans mon verre la nuit où Capestang est entrée au Louvre... la nuit des camions ! ajouta-t-il avec un sourire..."

À ce moment, un tumulte éclata à la porte du Louvre. Le roi tressaillit et porta avidement ses regards de ce côté. Luynes, Ornano, Richelieu, les quelques courtisans admis à rester près du roi se rapprochèrent vivement.

"Que se passe-t-il ? demanda le jeune roi.

— Il y a un carrosse arrêté devant le pont-levis, fit Ornano.

— Une jeune fille traverse le pont avec un homme. Oh ! quelle tenue pour entrer au Louvre ! D’où sort ce malheureux ?

— Sire, dit Richelieu, je vais, s’il plaît à Votre Majesté...

— Que personne ne bouge !" interrompit le roi.

Là-bas, le tumulte augmentait. Des gardes barraient le passage à l’homme signalé. Et cet homme, c’était Capestang. Cette jeune fille, c’était Giselle.

"Arrière ! criait le chef de poste.

— Allons donc ! fit Capestang. Appelez M. de Vitry et dites-lui que je viens de Meudon !"

À ce moment, il aperçut Vitry dans la cour, immobile à la tête de ses vingt gardes.

"Meudon !" cria Capestang d’une voix éclatante.

Le capitaine tressaillit, et, sans bouger, cria à son tour :