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UN CLAN BRETON.

lon la loi celtique ; la première par amitié et par dévouement.

Le vieux comte Érech aimait à les avoir auprès de lui, l’un et l’autre, à écouter la voix douce et frêle de Pialla, et celle plus grave et plus sonore du barde armoricain. Souvent il lui faisait répéter le chant héroïque de la Nationalité bretonne, vieux guerr à l’allure large et audacieuse, qui plaisait encore à son oreille, et lui rappelait les anciens jours ; puis, quand les chants lui jetant de singulières pensées, l’avaient rendu triste et taciturne, quand, après s’être reporté silencieusement au souvenir de ce qu’il avait été, il rouvrait les yeux à la lumière et à la réalité, c’était pour lui une joie caressante, expansive, joie de vieillard, que de retrouver la belle enfant de son frère, assise à ses pieds, et reposant sa gracieuse tête blonde sur ses deux genoux courbés. Il y a des liens sympathiques qui attachent les jeunes aux vieux, et Pialla rendait bien au bon vieillard toute l’amitié que ce dernier éprouvait pour elle.

Quant au fils du comte Érech, c’était le seul que l’on vît à Kerlô, le seul qui fût véritablement le maître du palais — prœfectus palatio. — Charge importante et que nul autre que le fils du chef ou son proche fût digne d’occuper. La vie qu’il menait, quoiqu’il s’y adonnât avec une grande ardeur, n’était cependant pas tout à fait conforme à ses goûts. Il eût mieux aimé, sans aucun doute, battre la campagne, dévaliser les voyageurs, attaquer ses voisins, ou même, tentant la fortune de plus grandes luttes, défendre, dans les combats, le territoire breton ; mais, pour le moment, les voyageurs étaient rares, les voisins redoutables, et les Armoricains et les Francs avaient remis l’épée au fourreau. Telle était la position que les temps lui avaient faite, qu’il ne lui