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CLARA ZETKIN

mes souvenirs personnels touchant celui qui fut le chef et l’ami inoubliable, et d’en publier quelque chose. Devoir envers lui qui nous a enseigné, par la théorie et par l’action, que la volonté révolutionnaire consciente peut donner sa forme propre à ce qui est nécessité historique. Devoir aussi à l’égard de ceux qu’il a aimés et pour qui il a travaillé toute sa vie, les prolétaires, les travailleurs, les exploités et les opprimés du monde entier, à qui, parce qu’ils souffraient, allait la pitié de son cœur, et en qui sa pensée fière reconnaissait et estimait les combattants de la Révolution et les constructeurs d’un ordre social supérieur.

C’est en automne 1920 que je revis Lénine pour la première fois depuis que la Révolution russe avait commencé d’ « ébranler le monde ». Immédiatement après mon arrivée à Moscou, à une conférence du parti, dans la salle Sverdlov, au Kremlin, si mes souvenirs sont exacts. Lénine m’apparut, tel qu’il était autrefois, à peine vieilli. J’aurais juré qu’il portait le même habit modeste, proprement brossé qu’il avait la première fois que je le rencontrai. C’était en 1907, au congrès de la IIe Internationale, à Stuttgart. Rosa Luxembourg qui possédait un œil d’artiste pour tout ce qui sortait de l’ordinaire, me montra Lénine en me disant : « Regarde bien celui-là, c’est Lénine. Regarde-moi ce crâne volontaire, têtu. Un vrai crâne de paysan russe, avec