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LE BOUTE-CHARGE

dans le cerveau de mon camarade de lit.

— Voici mon paquet de tabac — un horrible tabac délicieux.

— Veux-tu mon Jacob ? — une vieille pipe affreusement culottée qui me parut si douce.

C’était le résumé, la quintessence d’une foule d’idées pleine de bonté, d’affection réelle. Cette modeste offrande, ces paroles de naïve bienvenue éveillaient dans ma pensée de longs échos, et semblaient me dire :

— Tu regrettes ta liberté, ta famille, tes amis. Tu es triste : je comprends cela, va ! je l’ai été comme toi. Mais, vois-tu, ici, tu seras plus libre que partout ailleurs, car si tu fais ton devoir, si tu te conduis en bon soldat, tu pourras agir comme bon te semblera, en dehors des heures de travail. Nul ne viendra fouiller dans ta conscience, et tu n’auras à t’incliner devant personne que devant une abstraction qui courbe toutes les têtes, depuis les plumes blanches du général, jusqu’à la calotte du garde d’écurie : la Discipline. — Point de bassesses écœurantes ; aucune faveur