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LE BOUTE-CHARGE

longues causeries où les Champenois racontent les choses vues quand ils étaient tout enfants, il y a quelque dix-huit ans, où les autres écoutent avec des rages froides et répondent par les choses vues dans l’avenir, où la charge exécutée le matin sur le champ de manœuvres devient le point de départ d’interrogations fiévreuses, chacun a regagné son lit.

Et pendant que le silence enveloppe la garnison en même temps que la nuit qui tombe du haut des clochers mornes, le quartier s’écrase dans la paix du repos universel.

Car les journées sont rudes. Les galops nous ont secoués jusqu’au plus profond du corps ; la voltige nous a disloqués ; la salle d’armes nous a brisé bras et jambes ; et les rumeurs guerrières qui passent comme des orages inapaisés nous ont donné ces exaltations intimes après lesquelles le cerveau doit et veut se détendre pour quelques heures.

Dans la grande cour, tout se cache et se tait. Seules, les écuries conservent un dernier souffle de vie avec ce grondement sourd des