notre mordant et incisif pamphlétaire serait devenu avec
l’âge un insipide et ennuyeux écrivain. Les qualités que nous
trouvons dans la fable de l’Ane sont de celles qui ne peuvent
ni se perdre avec l’âge, ni s’emprunter pour un jour, l’esprit
de fine observation, l’art de plaisanter avec grâce, de s’identifier
à toutes les situations et de prêter à chacun, homme ou
bête, le langage qui lui convient ; enfin le naturel et une
sorte de bonhomie railleuse, autant de mérites que Lucien
seul chez les anciens a réunis dans une remarquable mesure.
Le cynisme même de quelques détails, la conversation de
Lucius et de Palestra, le récit de la lutte, rappellent trop les
libres allures des dialogues des courtisanes, pour qu’il n’y ait
pas entre les deux ouvrages une étroite parenté.