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Page:Zola - Contes à Ninon, 1864.djvu/197

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ET DU PETIT MÉDÉRIC

Sidoine, qui avait compris, aurait sauté au cou de son frère, si cela eût été possible. Lui dont l’imagination était fort paresseuse d’ordinaire, il voyait avec les yeux de l’âme, des champs de bataille vastes comme des océans, riante perspective qui faisait courir des frissons de joie le long de ses bras. Il se leva, serra la ceinture de sa blouse et se campa devant Médéric.

Celui-ci songeait, jetant autour de lui des regards tristes.

― Les habitants de ce pays ont toujours été bons pour nous, dit-il enfin. Ils nous ont soufferts dans leurs champs, et, sans eux, nous n’aurions pas si fière mine. Nous devons, avant de les quitter, leur laisser une preuve de notre reconnaissance. Que pourrions-nous bien faire qui leur fût agréable ?

Sidoine crut naïvement que cette question s’adressait à lui. Il eut une idée.

― Frère, répondit-il, que penses-tu d’un grand feu de joie ? Nous pourrions brûler la ville prochaine, à l’extrême satisfaction des habitants ; car, pour peu qu’ils aient mon goût, rien ne les distraira autant que de belles flammes rouges par une nuit bien noire.

Médéric haussa les épaules.

― Mon mignon, dit-il, je te conseille de ne jamais te mêler de ce qui me regarde. Laisse-moi réfléchir une seconde. Si j’ai besoin de tes bras, alors tu travailleras à ton tour.

― Voici, reprit-il après un silence. Il y a là, au sud, une montagne qui, m’a-t-on dit, gêne beaucoup nos