Page:Zola - Contes à Ninon, 1864.djvu/236

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
226
AVENTURES DU GRAND SIDOINE

amis, satisfaits d’être seuls, purent causer à l’aise des surprenantes aventures qui leur étaient arrivées depuis le matin. Je veux dire, tu m’entends, que Médéric bavarda une petite demi-heure, philosophant sur toute chose, priant son mignon de suivre avec soin le fil de son raisonnement. Le mignon, dès les premiers mots, ronflait, les poings fermés. Notre bavard, ne s’entendant plus lui-même, remit la suite de ses observations au lendemain. C’est ainsi que le roi Sidoine Ier dormit sa nuit à la belle étoile, dans un champ désert situé aux portes de sa capitale.

Les événements qui se passèrent les jours suivants ne méritent pas d’être rapportés tout au long, bien qu’ils aient été prodigieux et bizarres, comme tous ceux auxquels se trouvèrent mêlés les héros que j’ai choisis. Notre roi en deux personnes, — vois à quoi tient un mystère ! — ayant accepté la couronne par simple complaisance, se garda de tenter la moindre réforme, et laissa le peuple agir selon ses volontés ; ce qui se rencontra être la meilleure façon de régner, la plus commode pour le souverain et la plus profitable pour les sujets.

Au bout de huit jours, Sidoine avait déjà gagné cinq batailles rangées. Il crut devoir mener son armée aux deux premières. Mais il s’aperçut bientôt qu’au lieu de lui donner aide et secours, elle l’embarrassait, se mettant en travers de ses jambes, et risquant d’attraper quelque taloche. Il se décida donc à licencier les troupes et déclara entendre à l’avenir se mettre seul en cam-