Aller au contenu

Page:Zola - Contes à Ninon, 1864.djvu/279

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
269
ET DU PETIT MÉDÉRIC

geait pour l’instant au milieu des glaces, enjamba le pôle, sans plus de façons, et posa le pied dans l’autre hémisphère. Il était midi d’un côté, minuit de l’autre. Nos compagnons, qui quittaient un blanc soleil d’avril, continuèrent leur voyage par le plus beau clair de lune qu’on puisse voir. Sidoine, naïf de son naturel, pensa tomber à la renverse du manque de logique que lui parurent avoir en ce moment la lune et le soleil. Il leva le nez, considérant les étoiles.

— Mon mignon, lui cria Médéric dans l’oreille, voici l’instant ou jamais de te vulgariser l’astronomie. L’astronomie est la géographie des astres. Elle enseigne que la terre est un grain de poussière jeté dans l’immensité. C’est une science saine entre toutes, quand elle est prise à dose raisonnable. D’ailleurs, je ne m’appesantirai pas sur cette branche des connaissances humaines ; je te sais modeste et peu curieux de formules mathématiques. Mais, si tu avais le moindre orgueil, il me faudrait bien, pour te guérir de cette vilaine maladie, te faire entrevoir, chiffres en mains, les effrayantes vérités de l’espace. Un homme, si fou qu’il puisse être, quand il considère les étoiles par une nuit claire, ne saurait conserver une seconde la sotte pensée de Dieu créant l’univers, pour le plus grand agrément de l’humanité. Il y a là, au front du ciel, un démenti éternel à ces théories mensongères et vaines qui, considérant l’homme seul dans la création, disposent des volontés de Dieu à son égard, comme si Dieu avait à s’occuper uniquement de la terre. Les