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Page:Zola - Contes à Ninon, 1864.djvu/58

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LE CARNET DE DANSE

de petits yeux et une grande bouche. C’est une excellente fille. Peut-être parlaient-ils de moi. Les jeunes gens mentent donc. Alors je serais laide. Laide ! Thérèse l’est cependant davantage. Sûrement ils parlaient de Thérèse.

Georgette sourit et eut comme une tentation d’aller consulter son miroir.

— Puis, ajouta-t-elle, ils se sont moqués des dames qui étaient au bal. J’écoutais toujours et j’ai fini par ne plus comprendre. J’ai pensé qu’ils disaient de gros mots, et, comme je ne pouvais m’éloigner, je me suis bravement bouché les oreilles.

Le carnet de danse était en pleine hilarité. Il se mit à débiter une foule de noms pour prouver à Georgette que Thérèse était bien la petite sotte enlaidie par un maintien trop modeste.

— Paul a des yeux bleus, dit-il. Certes, Paul n’est pas menteur, et je l’ai entendu te dire des paroles bien douces.

— Oui, oui, répéta Georgette, monsieur Paul a des yeux bleus, et monsieur Paul n’est pas menteur. Il a des moustaches blondes que je préfère de beaucoup à celles de Charles.

— Ne me parle pas de Charles, reprit le carnet ; ses moustaches ne méritent pas le moindre sourire. Que penses-tu d’Édouard ? il est timide et n’ose parler que du regard. Je ne sais si tu comprends ce langage. Et Jules ? il n’y a que toi, assure-t-il, qui saches valser. Et Lucien, et Georges, et Albert ? tous te trouvent char-