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Page:Zola - Contes à Ninon, 1864.djvu/68

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CELLE QUI M’AIME

noire et chapeau en pointe semé d’étoiles, haranguait la foule du haut des planches.

— Entrez, criait-il, entrez mes beaux messieurs, entrez mes belles demoiselles. J’arrive en toute hâte du fond de l’Inde pour réjouir les jeunes cœurs. C’est là que j’ai conquis au péril de ma vie le Miroir d’amour que gardait un horrible Dragon. Mes beaux messieurs, mes belles demoiselles, je vous apporte la réalisation de vos rêves. Entrez, entrez voir Celle qui vous aime ! Pour deux sous Celle qui vous aime !

Une vieille femme, vêtue en Bayadère, souleva le pan de toile. Elle promena sur la foule un regard hébété ; puis, d’une voix épaisse :

— Pour deux sous, cria-t-elle, pour deux sous Celle qui vous aime ! Entrez voir Celle qui vous aime !



III


Le Magicien battit une fantaisie entraînante sur la grosse caisse. La Bayadère se pendit à une cloche et accompagna.

Le peuple hésitait. Un âne savant jouant aux cartes offre un grand intérêt ; un hercule soulevant des poids de cent livres est un spectacle dont on ne saurait se lasser ; on ne peut nier non plus qu’une géante demi-nue ne soit faite pour distraire agréablement tous les âges. Mais voir Celle qui vous aime, voilà bien la chose