Page:Zola - Fécondité.djvu/308

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n’ai pas un sou de monnaie… Et toi, Céleste, est-ce que tu as de la monnaie pour madame ? »

Elle s’était décidée à poser cette question, mais d’un tel ton, avec un tel regard, que l’autre comprit.

« Je n’ai pas un sou sur moi. »

Il y eut un grand silence. Puis, le cœur meurtri, avec un geste de résignation désespérée, Mme Menoux s’exécuta.

« Gardez ces cinq francs-là pour vous, madame Couteau, puisque vous vous donnez tant de peine. Et, mon Dieu ! que tout cet argent me porte bonheur, fasse au moins que mon pauvre petit devienne, comme son père, un grand et bel homme !

— Ah ! pour ça, je vous en réponds ! cria la meneuse enthousiasmée. Ça ne veut rien dire, ces bobos, au contraire ! J’en vois assez des petiots, moi, et rappelez-vous ce que je vous prédis : le vôtre sera extraordinaire. Il n’y a pas mieux. »

Lorsque Mme Menoux s’en alla, la Couteau l’avait comblée de telles flatteries, de telles promesses, qu’elle était toute légère, toute gaie, ne regrettant plus son argent, rêvant au jour où son Pierre lui reviendrait, avec de grosses joues et une vigueur de jeune chêne.

Dès que la porte fut refermée, Céleste se mit à rire, de son air de belle impudence.

« Lui en as-tu conté des histoires ! Je parie que son petit n’a pas même été enrhumé, »

La Couteau prit d’abord un air digne.

« Dis-moi tout de suite que je mens. L’enfant ne va pas bien, je t’assure. »

La gaieté de la femme de chambre redoubla.

« Non ! que tu es drôle, à faire cette tête-là avec moi ! Voyons, je te connais, je sais ce que ça veut dire, quand le bout de ton nez remue !