Page:Zola - Fécondité.djvu/53

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jour avec l’idée de la faute. Le pire désastre devait être au bout, car il avait en plus la sottise de se montrer souvent moqueur et brutal à son égard, ce qui la froissait au point de la détacher, de lui faire rêver d’être aimée, d’être caressée autrement, avec tendresse et douceur.

Lorsque Mathieu pénétra dans l’hôtel, dont la façade Renaissance, très ornée, alignait huit hautes fenêtres, à chacun des deux étages, il eut un léger rire, égayé de nouveau par cette pensée :

— Voilà un ménage qui n’attend pas les trois cents francs de son mois, avec trente sous en poche.

Le vestibule était d’une grande richesse, bronze et marbre. À droite, il y avait deux salons de réception et la salle à manger ; à gauche, un billard, un fumoir et un jardin d’hiver. Au premier étage, en face du large escalier, le cabinet de Séguin, une vaste pièce de cinq mètres de haut, de douze de long sur huit de large, tenait tout le centre de l’hôtel, tandis que l’appartement du mari se trouvait à droite, et celui de la femme à gauche, ainsi que les chambres des enfants. Enfin, au second étage, étaient réservés deux appartements complets pour l’époque où les enfants auraient grandi.

Un valet qui connaissait Mathieu, le fit monter tout de suite au cabinet de monsieur, où il le pria d’attendre, en disant que monsieur achevait de s’habiller. Un instant, le visiteur put se croire seul ; et il jeta un coup d’œil autour de lui, dans la vaste pièce, amusé par le décor vraiment superbe, la haute verrière, faite d’anciens vitraux, les tentures de vieilles étoffes, des velours de Gênes, des soies brochées d’or et d’argent, les bibliothèques de chêne, alignant les dos luxueux des volumes, les tables chargées de bibelots, des orfèvreries, des verreries, des bronzes, des marbres, parmi lesquels la collection des fameux étains modernes. Et c’étaient des tapis d’Orient jetés partout, des sièges bas pour toutes les paresses, des