Page:Zola - La Confession de Claude (Charpentier 1893).djvu/122

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sur un front de quinze ans tant de pureté & tant de pâleur, toutes les grâces naïves de la jeune fille & toutes les fatigues honteuses de la femme.

Elle avait replié les bras & soutenait sa tête languissante. J’ignorais son histoire, je ne savais qui elle était, ni ce qu’elle faisait là. Mais, à tout son être, je voyais l’innocence de son cœur & la honte de son corps, je reconnaissais la jeunesse de ses regards & la vieillesse prématurée de son sang, je me disais qu’elle allait mourir de décrépitude à quinze ans, vierge d’âme. Émaciée & affaiblie, elle s’étendait comme une courtisane & souriait comme une sainte.

Je suis resté deux grandes heures entre Jacques & Marie regardant ces deux êtres, étudiant ces deux visages. Je ne pouvais deviner ce qui avait rapproché un tel homme d’une telle femme. Puis, j’ai songé à Laurence, & j’ai compris qu’il y a des unions fatales.