taine dans son cabinet, voulut l’installer lui-même sur le canapé ; et Gilberte s’en alla, malgré la leçon, de son air d’oiseau secouant les ailes, gai quand même sous l’orage ; tandis que la servante, à qui l’on avait confié Jean, le conduisait à travers les cours de la fabrique, dans un dédale de couloirs et d’escaliers.
Les Weiss habitaient rue des Voyards ; mais la maison, qui appartenait à Delaherche, communiquait avec la bâtisse monumentale de la rue Maqua. Cette rue des Voyards était alors une des plus étranglées de Sedan, une ruelle étroite, humide, assombrie par le voisinage du rempart qu’elle longeait. Les toitures des hautes façades se touchaient presque, les allées noires semblaient des bouches de cave, surtout dans le bout où se dressait le grand mur du collège. Cependant, Weiss, logé et chauffé, occupant tout le troisième étage, s’y trouvait à l’aise, à proximité de son bureau, pouvant y descendre en pantoufles, sans sortir. Il était un homme heureux, depuis qu’il avait épousé Henriette, si longtemps désirée, lorsqu’il l’avait connue au Chêne, chez son père, le percepteur, ménagère à six ans, remplaçant la mère morte ; tandis que lui, entré à la Raffinerie générale presque à titre d’homme de peine, se faisait une instruction, s’élevait à l’emploi de comptable, à force de travail. Encore, pour réaliser son rêve, avait-il fallu la mort du père, puis les fautes graves du frère, à Paris, de ce Maurice, dont la sœur jumelle était un peu la servante, à qui elle s’était sacrifiée toute pour en faire un monsieur. Élevée en cendrillon au logis, sachant au plus lire et écrire, elle venait de vendre la maison, les meubles, sans combler le gouffre des folies du jeune homme, lorsque le bon Weiss était accouru offrir ce qu’il possédait, avec ses bras solides, avec son cœur ; et elle avait accepté de l’épouser, touchée aux larmes de son affection, très sage et très réfléchie, pleine d’estime tendre sinon de passion amoureuse. Main-