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LES ROUGON-MACQUART.

— C’est pourquoi, mon cher frère, ma chère sœur, vous devez vivre dans la foi catholique, qui seule peut assurer la paix de votre foyer. Vos familles vous ont certainement appris à aimer Dieu, à le prier matin et soir, à ne compter que sur les dons de sa miséricorde…

Il n’acheva pas. Il se tourna pour prendre le calice sur l’autel, et rentra à la sacristie, la tête penchée, précédé de Vincent, qui faillit laisser tomber les burettes et le manuterge, en cherchant à voir ce que Catherine faisait, au fond de l’église.

— Oh ! la sans-cœur ! dit Rosalie, qui planta là son mari pour venir prendre son enfant entre les bras.

L’enfant riait. Elle le baisa, elle rattacha son maillot, tout en menaçant du poing Catherine.

— S’il était tombé, je t’aurais allongé une belle paire de soufflets.

Le grand Fortuné arrivait, en se dandinant. Les trois filles s’étaient avancées, avec des pincements de lèvres.

— Le voilà fier, maintenant, murmura Babet à l’oreille des deux autres. Ce gueux-là, il a gagné les écus du père Bambousse dans le foin, derrière le moulin… Je le voyais tous les soirs s’en aller avec Rosalie, à quatre pattes, le long du petit mur.

Elles ricanèrent. Le grand Fortuné, debout devant elles, ricana plus haut. Il pinça la Rousse, se laissa traiter de bête par Lisa. C’était un garçon solide et qui se moquait du monde. Le curé l’avait ennuyé.

— Hé ! la mère ! appela-t-il de sa grosse voix.

Mais la vieille Brichet mendiait à la porte de la sacristie. Elle se tenait là, toute pleurarde, toute maigre, devant la Teuse, qui lui glissait des œufs dans les poches de son tablier. Fortuné n’eut pas la moindre honte. Il cligna les yeux, en disant :